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JE SUIS JE SUIS

[A l’heure où des « je suis » font flamber les esprits,
un ancien poème anti-identitaire retrouvé quelque part]

Je suis je suis

Je suis le vertige de l’espace où tout est possible infini
la frayeur du possible sans limite, sans repère

Je suis vivant dans l’instant prêt à tout

Je suis un Titan désespéré qui lutte avec les dieux en sachant qu’il va perdre mais pas le choix
il faut bien jouer encore un instant
repousser la mort là-bas, au-delà de ce petit champ,
la chasser un peu, rire de sa morgue, de sa faux, de son air de sanglot sans violon, de ses longs trémolos

Je suis attentif à tout pourtant car je sais qu’elle joue bien
la mort aussi et si mon rire soudain se fait trop fort
je ferme les yeux et la voilà dans ma voix
qui me mord le cou, qui me tord les boyaux : c’est mon rire le sanglot

Je suis oui Prométhée qui déroba le feu aux dieux
et je ne regrette pas l’aigle qui mange mon foie
c’est si bon le feu, et l’aigle même mourra

Je suis celle qui voulût goûter le fruit et celui qui goûta aussi car
je n’avais pas le choix et tout le monde en Eden savait que ça allait se passer comme ça, quelle blague ! mais je travaille dur depuis je ne chôme pas – même quand on croît que je rêvasse, ah ! je suis à la tâche, à digérer la connaissance et
voilà c’est fait : je suis au nirvana d’ailleurs je suis un rigolo qui peut bien dire n’importe quoi car

Je suis de celles et ceux aujourd’hui qui se coltinent cette sacrée lutte en conscience : dépasser la dualité, en finir avec la souffrance, être esprit et incarné

Je suis un monstrueux paradoxe qui ne sait pas s’il doit en rire ou en pleurer
je suis si traversé d’homo machin que j’ai toujours en double chaque défaut avec sa qualité

Je suis une poussière d’humanité qui se jette sans hésiter dans le feu de dieu,
le feu de tes yeux pour brûler sans résidu en dansant la vie

Je suis toi, je suis elle, je suis il, je suis rien du tout
je suis nous en nous
nous en nous

Je suis à en crever
à percer l’enveloppe de l’être
pour accepter enfin d’y rester tout entier
avec mes soeurs et frères d’humanité
je suis enthousiasmé
je suis un soleil d’amour pour nous

Je suis inquiète – quelle merveille ! je veille, je ne dors pas car je sens je sens que tout peut arriver : je suis sensible à tout. Si prête à tout. Je suis si vive, si faible et si fragile, si douce, si vivante. Je suis si ! si ! si, je le suis !

Je suis inquiète, un rien m’effraie, j’ai si peur du monde, si peur de tout, si peur de toi, regarde, je me soumets je m’efface, je te laisse toute la place, je m’allonge à tes pieds, je m’humilie avec joie pour que tu sois, toi, le roi – je te caresse et te baise les pieds, et ça me remplit d’aise parce que je sais que je suis quoi qu’il arrive ta servante, ton soutien, ton secours,

Je suis toujours là pour aider – si tu n’y arrives pas tout seul, je serai là – si tu as besoin d’un coup de main, je suis celle qu’il te faut et je ne faillis jamais

Je suis prête pourtant à tout lâcher si jamais il le faut, si c’est ce que tu veux en secret, si vient soudain la limite à mon humanité

Je suis offerte, je suis sincère, toute nue devant la flamme, tu me vois toute entière donnée, abandonnée au regard de la grâce, dévouée,

je suis pourtant prête aussi à pincer, à t’agacer, à te tirer les poils pour jouer si soudain tu t’ennuies ou moi, car je suis aussi la fillette folle qui rit sans s’arrêter, les yeux qui brûlent, et qui ne veut rien que danser, danser, te sauter dans les bras, danser sans s’arrêter.

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